La constitution du Cameroun de 1996, instituait le conseil constitutionnel, son effectivité s’est faite le 07 février 2018 (soit 22 ans plus tard). Le Président Paul Biya lui-même a choisi les membres de la dite cour par décret présidentiel. Ils sont au nombre de 11, nommés pour un mandat de six ans, renouvelable éventuellement. Une rupture dans la forme et les procédés de nomination avec ce qui est pratiqué en Afrique francophone et en France, où le Conseil Constitutionnel est le modèle des juridictions constitutionnelles africaines. Il s’agit en outre d’une juridiction constitutionnelle aux compétences techniques, avec des spécialistes et praticiens du droit, des enseignants d’université.
Seul hic, on y trouve un conseiller juridique du Chef de l’Etat, ce qui pose le problème de la neutralité et de l’indépendance du juge constitutionnel camerounais. Le Président dudit Conseil est un magistrat, Clément Atangana Ses membres prêtent serment devant le parlement réunis en congrès et non devant le Président de la République comme c’est le cas en France.
De plus plusieurs membres de cette juridiction sont d’anciens ministres ayant appartenu de jure ou de fait au parti au pouvoir, le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC). << Je suis surpris que parmi les onze personnes qui sont nommées, il y’a au moins 5 anciens membres du gouvernement qui sont des membres du parti au pouvoir et je suis inquiet aussi pour les âges, il seront membres de ce conseil jusqu’à presque 90 ans>> déclarait un avocat et candidat à l’élection présidentielle du Cameroun, Akere Muna.
Au regard de la compétence exclusive, totale et intégrale du Président du Cameroun en matière de nominations, et puisqu’il s’agit d’hommes du sérail, on est presque tenté de dire que le Conseil Constitutionnel camerounais est la chose du Président de la République, un instrument qui aura du mal à ne pas le servir car la Cour compte effectivement cinq membres du comité centrale du parti au pouvoir. Il est difficile de voir en ce Conseil, un organe indépendant qui sache aussi faire le contre-pouvoir. D’ailleurs, l’universitaire Basile Louka a déclaré à propos que <<On va voir le Conseil à l’oeuvre mais il me semble, en apparence, être une équipe d’accompagnement du pouvoir en place. Quand l’arbitre d’un match porte le maillot d’une des deux équipes, ça trouble toujours le jeu>>.
En somme, cette ingénierie constitutionnelle Camerounaise se démarque carrément du modèle mère français en matière de nomination des membres du Conseil, en l’absence de tout contrôle sur l’action du Président de la République mais elle se démarque aussi des modèles africains puisque ces derniers tendent à rendre leurs juridictions constitutionnelles autonomes, du moins en apparence (cas de la Guinée-Conakry et du Mali).
Le caractère atypique de cette cour réside d’abord dans la durée de mandat, six ans c’est relativement court, en dessous de la durée de mandat au sein des juridictions sœurs d’Afrique francophone, la question de l’inamovibilité des juges est assez déroutante ; on note que ces derniers peuvent être reconduits ‘’éventuellement’’. Cela suppose donc que leur reconduction est laissé à la volonté discrétionnaire du Chef de l’Etat.
Ainsi, le membre de la cour ne devra-t-il sa survie qu’au nom de la magnanimité et du bon vouloir du Chef de l’Etat et non pas sur la base des critères fixes, objectifs et rigides, ce qui suppose que les membres de la Cour pourraient être redevables au Président, lui renvoyer l’ascenseur de leurs nominations.
C’est l’article 51 de la Constitution camerounaise revisitée de 2008 qui stipule que : <<Le Conseil Constitutionnel comprend onze (11) membres désignés pour un mandat de six (6) ans éventuellement renouvelable.
Les membres du Conseil Constitutionnel sont choisis parmi les personnalités de réputation professionnelle établie. Ils doivent jouir d’une grande intégrité morale et d’une compétence reconnue.>> Le terme éventuellement pose problème car ce dernier signifie hypothétiquement mais aussi dans la mesure du possible, cela fait des critères de nomination et de maintien de membres du Conseil Constitutionnel, un mystère.
Analyse.
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